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Lauriane Firoben
céramique contemporaine

Chemin technique

Photo de Lauriane Firoben, céramique contemporaine

Céramiques utilitaires et pièces uniques artistiques (sculptures et muraux), tournées ou modelées puis polies ;
Terres sigillées, préparées principalement à partir d’argiles de cueillette ;
Cuissons au bois en four à bois éphémère (four papier) ou en four à bois maçonné (four phœnix) ;
Cuissons au gaz avec enfumages – parfois…

Terre sigillée ou engobe sigillé : appellation communément admise dans la céramique contemporaine pour désigner une argile liquide finement affinée et utilisée comme couverte en surface des œuvres, qui s’avère très sensible au jeu des flammes et apporte, après cuisson, un rendu satiné à brillant ; technique héritée de certaines céramiques gallo-romaines et grecques, et revisitée de multiples façons par les céramistes contemporains, notamment par le jeu des cuissons, dans une recherche d’expression personnelle.

Par glissement de sens, l’expression terres sigillées désigne donc aujourd’hui des céramiques dont le revêtement est fait d’une argile finement affinée, qui se rapproche du vernis rouge grésé caractéristique des céramiques sigillées antiques.

Ces dernières, ainsi nommées par les archéologues, constituent une production particulière de céramiques, pour la table et la conservation, issues des ateliers gallo-romains, environ du 1er siècle avant JC jusqu’au 4e voire 5e siècle après, dans les ateliers d’Italie puis de la Gaule et de tout l’Empire Romain. Sorte de première production de masse de l’histoire, exportée jusqu’aux confins de l’Empire Romain, elles sont caractérisées par un engobe de surface très affiné et vitrifié, ainsi que par l’usage fréquent d’estampilles – sceaux / sigillum en latin – pour signer les pièces et ainsi identifier l’atelier de production, voire l’ouvrier.

Histoires de terres, histoires de mains, histoires de feu :
petite histoire d’une céramique dans l’atelier

Préparation des terres sigillées

Mes terres sigillées sont préparées, sauf exception, à partir d’argiles de cueillette, argiles sauvages vivantes et vibrantes.

La recette de préparation, qui fait l’objet de tests successifs, s’adapte à chaque terre en fonction de sa nature et des effets recherchés.

Réalisation des céramiques

Je recours à diverses techniques de mise en forme de l’argile pour créer mes pièces, avant de leur offrir un patient polissage pour unifier au mieux la surface.

Cette finesse de finition s’impose pour contrer la tendance naturelle des engobes sigillés à décoller lors de la cuisson, et pour éviter tout défaut de surface que l’extrême minceur de la pellicule d’engobe sigillé ne saurait dissimuler, bien au contraire.

Cuissons

Les cuissons au bois (monocuissons au bois) sont mon mode de cuisson privilégié, auquel s’est adjointe une pratique de cuisson au gaz avec enfumage pour la voie des pièces noires. Selon que les pièces sont utilitaires ou décoratives, et selon les effets de couleurs et de matières souhaités, je vais mener mes cuissons afin soit de vitrifier mes terres sigillées pour les rendre étanches, soit au contraire de les laisser poreuses, puisque selon son état et son degré de cuisson, un même engobe sigillé peut offrir une vaste palette de nuances.

Dans tous les cas, les pièces sont généralement partiellement confinées en gazette, afin de créer autour d’une zone de chaque pièce une microatmosphère qui, par le jeu des gaz et des flux générés ou filtrés, animera la surface d’un poème coloré singulier.

Il n’a jamais été question pour moi que de cuire au bois, et de laisser le feu marquer de son étreinte chaque terre, d’abord en four à bois éphémère, puis en four à bois en briques. Pourtant après une douzaine d’années en seule compagnie de four à bois, un four à gaz est arrivé à l’atelier, dans un temps où mon dos réclamait de lui épargner les contraintes supplémentaires du four à bois, et où l’envie de développer la voie des noirs de fumée s’accommodait parfaitement du gaz pour les enfumages. Mon travail exploite donc trois fours différents.

Four à bois éphémère : four papier

Mis au point dans les années 80 par Fabienne Gioria et Aline Favre, céramistes suisses, le four papier, qui est un four à bois éphémère, s’inspire des cuissons dites primitives. Les céramiques empilées sur une grille sont entourées d’un tipi de bois, lui-même protégé par une coque faite de couches de papier glacé enduit de barbotine. L’adjonction d’un petit alandier à la base du dispositif permet de gérer une phase de préchauffage avant l’embrasement du tipi de bois, dont la combustion cuit tout à la fois la coque, qui durcit et devient isolante, et les céramiques qui se retrouvent en pleine flamme. La coque isolante permet de monter facilement aux alentours de 1000° lorsque l’édifice se transforme en petit volcan crachant sa flamme, tandis qu’à l’intérieur, le feu écrit ses histoires sur chaque céramique qu’il étreint.

Pendant 5 ans, toute ma production a été cuite à l’aide de fours papier, première approche fascinante des cuissons au bois, dans une grande proximité avec le feu, contenu par une simple coque de papier et d’argile. Je réserve aujourd’hui ce type de cuisson, l’énergie et les incertitudes qui l’accompagnent, à certaines de mes céramiques, dans la recherche d’effets spécifiques, plus sauvages et plus atmosphériques, que je n’obtiens qu’en four papier. Construire le four autour des pièces, le laisser s’embraser, déliter la coque pour pouvoir récupérer les céramiques : bûcher matriciel, réparateur et fécond, pour faire oublier tant d’autres bûchers destructeurs, et donner vie…

Four à bois en briques : four phœnix

Après 5 années à cuire exclusivement en four papier des pièces dont la nature décorative primait, j’ai pris le parti de développer des petites pièces au caractère utilitaire plus affirmé, ce qui requérait de pouvoir davantage contrôler la température de mes cuissons afin de vitrifier mes terres sigillées. Thierry Landault, céramiste à Delle (90), m’a ouvert la porte de son petit four phœnix, dont j’ai profité plusieurs années avant de construire mon propre four phœnix à l’abri des grands arbres de mon atelier.

Ce four à bois à flamme bouclée, plus sage qu’un four papier, mais permettant une conduite de cuisson beaucoup plus fine, m’offre de nombreuses possibilités de cuissons en jouant sur les variations de température et d’atmosphère. Et si le feu est ici séparé de moi par une double paroi de briques et me semble parfois un peu plus lointain, un patient apprentissage pour nous connaître mutuellement va me permettre de jouer une infinité de partitions enflammées, renouvelées à chaque cuisson au gré des notes de terres offertes, de l’humeur du feu et de la mienne.

Four à gaz

Un dos momentanément récalcitrant, une construction de four à bois plus longue que prévue, et la magie des ciels étoilés du Sahara algérien, devenu pour moi terre d’accueil, m’ont poussée en 2019 à ralentir le rythme de mes cuissons au bois et à approfondir la voie des noirs, où je me promenais régulièrement depuis mes débuts.

Les céramiques noires sont biscuitées puis enfumées dans le four à gaz, en usant de stratagèmes proches de ceux de mes cuissons au bois pour générer des paysages de fumées.

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